Droit rural/fermier et fermage Pour un statut d’avenir au service de l’entreprise agricole (3/13)
Le statut du fermage est le socle foncier pour tous les fermiers de France. Il est le support indispensable à toute activité agricole durant toutes les phases de la vie professionnelle des agriculteurs. Dans un rapport d’orientation rendu public lors du dernier congrès de la section nationale des fermiers et métayers, celle-ci dresse un ensemble de propositions pour inscrire le statut du fermage dans l’avenir. Terre-net Média publie l’intégralité de ce rapport de 18 pages par chapitre afin de prendre connaissance des revendications portées par la section spécialisée de la Fnsea. Ce chapitre est consacré à la création du statut du fermage.
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1.1 Et le législateur créa le statut
On ne peut évoquer le statut du fermage sans évoquer son histoire et le contexte de sa création. La France, dans les années 1940, se reconstruit peu à peu après la guerre qu’elle vient de subir. La mise en place d’une agriculture performante, permettant de palier la problématique alimentaire et le développement de son économie est l’objectif numéro un. La France doit devenir le leader en termes de production agricole et l’Allemagne, de l’industrie.
Durant cette période, les exploitants subissent une grande précarité : lorsqu’ils louent des terres agricoles, ils ne bénéficient que des dispositions de droit commun. Aucune spécificité sur la location des terres agricoles n’est prévue. De ce fait, ils ont d’importantes difficultés à développer leurs exploitations, conséquence d’un cadre trop souple. Une trop grande liberté de reprise est accordée aux propriétaires, sans parler du prix fixé sans limite, ni des charges supportées par les exploitants. Cette très grande liberté a d’autres conséquences : l’exploitant a, en supplément d’importantes charges, l’impossibilité de se projeter sur son exploitation, voire même la nécessité de trouver de nouvelles parcelles chaque année. Et l’impact n’est pas neutre en termes de production agricole : les exploitants ne peuvent investir du temps et des frais afin de réaliser des améliorations culturales sur les parcelles qu’ils exploitent, puisqu’ils ne sont pas garantis de bénéficier des parcelles les années suivantes.
Essence même du syndicalisme, les fermiers de France militent pour l’instauration de règles permettant de pérenniser leur situation. En 1946, un premier cadre du statut du fermage est établi : les baux ont une durée minimale et le preneur un droit au renouvellement. Le droit de reprise tout comme le prix du bail est encadré. Aucune redevance en supplément du loyer ne peut être exigée. Lors de la vente du terrain, il est accordé au preneur la possibilité de préempter. Le preneur évincé a désormais droit à l’Ips1.
Pour garantir les droits aux preneurs et aux bailleurs, de nouvelles instances judiciaires sont mises en place : les tribunaux paritaires des baux ruraux. Parallèlement, les fermiers et bailleurs ont la possibilité de s’exprimer au sein des commissions consultatives paritaires des baux ruraux. Le statut du fermage devint un outil incontournable, pilier de la politique des structures.
Par la suite, les grandes lois d’orientation agricole de 1960 et 1962 ont bâti la politique des structures en mettant en place le contrôle des cumuls et les Safer, tout en apportant des compléments au cadre juridique du statut du fermage. Les règles des Ips sont amendées, les baux des collectivités sont désormais soumis au statut, le preneur a le droit de céder son bail dans le cadre familial avec l’accord du bailleur.
En 1970, le législateur confère une plus grande stabilité aux exploitants en instaurant le bail à long terme.
Diverses modifications législatives sont intervenues par la suite. Le statut du fermage a été mis en place pour construire l’agriculture que nous connaissons aujourd’hui. Le législateur a pris conscience de la nécessité d’encadrer les relations contractuelles des bailleurs et des preneurs, au vu de la nécessité d’une stabilité foncière au sein même de l’exploitation agricole. C’est en garantissant une stabilité foncière à l’exploitant que l’économie des entreprises agricoles a pu se développer.
L’agriculture aujourd’hui connaît une forte mutation et a plus que jamais besoin de stabilité foncière. Des pressions de tous ordres sont exercées sur les exploitants agricoles : hausse des charges, pression foncière, augmentation du prix du foncier, lois et règlements environnementaux… Le statut du fermage aura prochainement 70 ans. Il demeure, au vu du contexte que nous connaissons tous, toujours d’actualité.
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